Agnotologie
Être dans la nature ainsi qu’un arbre humain
Étendre ses désirs comme un profond feuillage
Et sentir, par la nuit paisible et par l’orage
La sève universelle affluer dans ses mains !
Anna de Noailles, Le Cœur innombrable, 1901.
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Le mot #stimulant Agnotologie
L’agnotologie est l'étude de la production culturelle de l'ignorance1 et du doute2. Elle peut être produite de manière involontaire ou dans le cadre d’une stratégie délibérée. Son illustration la plus célèbre est la stratégie délibérée de recours, par l'industrie du tabac, à des études scientifiques biaisées, destinées à jeter le doute sur les découvertes démontrant la nocivité du tabac.
Pourquoi ce mot ? Parce que je trouve que l’idée d’étudier la production de l’ignorance voire de la bêtise est assez fascinante. #climatosceptiques
Article #inspirant
« Les moutons ont des amis et des conversations » - Jek klak
Deux historiennes des sciences, Carla Hustak et Natacha Myers ont écrit en ce sens un très joli article sur l’évolution16. Aujourd’hui, on étudie beaucoup – comme Darwin l’avait très sensuellement fait en son temps – le rapport entre les insectes pollinisateurs et les orchidées. Il y a toute une chimie écologique qui permet de mieux comprendre les rapports des parfums attracteurs, des phéromones… L’article montre que ces rapports sont généralement décrits sur le mode de l’exploitation avec un dupe et un être qui leurre. Quand la fleur crée des appâts pour faire venir des insectes, on imagine que la plante exploite l’insecte puisqu’il y va à perte, croyant féconder un être fécondable. Mais plutôt qu’un simple système d’exploitation, ne peut-on pas imaginer des relations qui se seraient instaurées, avec des plaisirs sensuels, des rencontres ? De la même manière, il faut être très attentif à ne pas penser la domestication uniquement sous le régime de l’exploitation : des tas de relations s’y créent, réciproques, asymétriques.
Pourquoi cet article ? Je trouve que cette idée de sortir de l’anthropomorphisme de l’exploitation d’un animal vers un autre (et inversement de l’entraide en mode bisounours) est importante. Les relations sont plus complexes que ça et surtout situées dans le temps. Ce n’est pas parce qu’il y a asymétrie qu’il y a exploitation… on parle bien des animaux et… les mots nous manquent.
Initiative #réjouissante
Le baromètre des transitions - Grenoble
Le projet « Baromètre des transitions » s’appuie sur un Panel de recherche territorialisé lancé en mai 2020 par GEM. Les participants sont des résidents des 49 communes de Grenoble Alpes Métropole invités à participer à des études en ligne régulières sur des sujets d’actualité liés au territoire. Une seule personne par foyer peut participer au Panel. Le Panel est régi par un conseil scientifique de professeurs de GEM qui valide le choix des études distribuées par le Panel. Fondé sur le modèle d’autres panels de recherche, comme celui de l’Université d’Aarhus au Danemark, le Panel permet à tout habitant de la Métropole de plus de 18 ans, non salarié(e) ou étudiant(e) de GEM, de s’inscrire sur une plateforme dédiée, et de recevoir régulièrement des invitations à participer à des études en ligne indemnisées.
Chaque étude prend la forme d’un questionnaire à remplir en ligne, d’une durée de 30 minutes environ et d’une indemnisation à hauteur de 5€.
Pourquoi cet article ? Parce que je trouve le dispositif excellent ! Plutôt que de compter sur des évaluations ponctuelles renégociées une par une, ou sur des sondages tout aussi ponctuels (et souvent trop politiques), l’idée d’un panel stabilisé dont les participants sont gratifiés me semble excellente !
Merci Nicolas ! (première dédicace, à 3 j’offre une bière)
Le #carton_rouge au gardiens du patrimoine bâti contre le climat
À Paris, l’impossible reprise de volets - Les jours
Début juin, lors d’un événement consacré à la feuille de route de l’adaptation de Paris aux vagues de chaleur qui réunissait plusieurs représentants de l’exécutif parisien, Dan Lert, l’adjoint au climat, résumait plus directement encore cette pensée : « Un tiers des projets de rénovation sont freinés par les ABF, c’est au gouvernement de faire désormais évoluer leur mission : on doit avoir des ABF qui nous aident ! », nous a-t-il dit. Comment les Architectes des bâtiments de France comptent-t-il désormais concilier protection du patrimoine et adaptation des immeubles parisiens aux mégacanicules ? Sollicités par Les Jours, ils n’ont même pas daigné répondre à la question. Il s’agirait pourtant de se lancer dans cette bataille avant que les Parisiens ne passent à des méthodes plus radicales. Un dilemme que résume à sa manière Christine Ledroit, l’habitante du HBM du XIIe. « Je ne veux pas paraître une vieille rabougrie qui est contre le progrès mais je trouve ridicule d’être obligée de mettre la clim quand on peut avoir des volets. »
Pourquoi cet article ? Parce que le problème est bien connu et que l’urgence climatique doit inverser les priorités de régulation. La protection du patrimoine ne doit pas primer sur la lutte contre le réchauffement climatique.